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Cet article est paru dans Le Devoir le 24 février, 2022.

Par Steven Price (président émérite, Oiseaux Canada), Jean-Sébastien Guénette (directeur général, QuébecOiseaux), Ian Davidson (directeur régional pour les Amériques, BirdLife International) et Graham Saul (directeur général, Nature Canada)

Les bons côtés de la pandémie de COVID-19 sont rares, mais l’un d’entre eux est certainement le fait que les Canadiens ont renoué avec le plein air et la nature. Nous avons fait du vélo ou du jogging quand les gymnases étaient fermés. Au sortir de réunions Zoom, nous avons marché, contacté des amis et compté nos pas avec la famille. Et beaucoup d’entre nous ont découvert pour la première fois les oiseaux dans nos cours et depuis nos balcons. Or la plupart des Canadiens seraient surpris d’apprendre que le gouvernement fédéral n’a pas encore adopté le règlement proposé pour mieux protéger les oiseaux migrateurs.

Tellement de gens nous ont dit combien de merles ils avaient vus pendant la pandémie qu’il semblait y avoir une explosion de la population. Les ventes de graines pour oiseaux et de mangeoires ont bondi. Les forums en ligne et les échanges sur Instagram relatifs à l’avifaune se sont multipliés. L’isolement et la distanciation sociale nous ont fait mettre les pieds dehors et tourner les yeux vers le ciel.
Merle d’Amérique Photo: Andrea Kingsley

En Amérique du Nord, les nombres d'oiseaux a diminué de trois milliards depuis 1970

Les oiseaux ont désespérément besoin de ce regain de popularité en ce moment. En Amérique du Nord, leur nombre a diminué de trois milliards depuis 1970. Les oiseaux que beaucoup d’entre nous tenaient pour acquis – hirondelles, martinets, alouettes, oiseaux de rivage – sont beaucoup moins abondants qu’avant. Les menaces multiples que font peser les changements climatiques, la perte d’habitat, la pollution, les chats errants et les animaux de compagnie non contrôlés, les vitres des fenêtres et les lignes de transmission déciment les populations plus rapidement que celles-ci peuvent se maintenir. Récemment, des scientifiques ont montré comment le déclin des populations d’oiseaux et d’autres espèces sauvages nuit à la dispersion naturelle des fruits et des graines des plantes, ce qui compromet la réponse de la nature aux changements climatiques car les aires de répartition potentielles des espèces se déplaçant rapidement.

Il y a plus de cent ans, des dirigeants visionnaires du Canada et des États-Unis ont adopté un traité de grande portée pour protéger les oiseaux migrateurs dont nos pays partagent les aires. Ce traité, signé ultérieurement par le Mexique, a permis d’endiguer la chasse non réglementée généralisée; c’est un des accords de conservation les plus anciens et les plus efficaces au monde. Jusqu’à ses derniers jours tumultueux au pouvoir, l’administration Trump a tenté de vider le traité de sa substance, mais les changements ont été annulés l’an dernier par l’administration Biden. Le gouvernement canadien et la société civile des deux pays ont fait pression avec succès pour que les éléments essentiels du traité soient conservés.

 Avocettes d’Amérique Photo: Debra Herst
Sturnelle de l’Ouest Photo: Val George
Maintenant, c’est au tour du Canada de prendre des mesures pour donner plus de mordant au traité. Le nouveau règlement fédéral sur les oiseaux migrateurs, proposé en 2019, attend d’être adopté par notre ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault. Plus que la plupart des citoyens, ce dernier comprendra comment cette démarche visant à respecter les engagements mondiaux du Canada en matière de conservation de la biodiversité servira également à atténuer les effets des changements climatiques.

Entre autres avancées pour les oiseaux, le nouveau règlement, une fois adopté, lèvera l’ambiguïté actuelle relative au fait qu’il est interdit de capturer, tuer, blesser ou harceler les oiseaux migrateurs. Par exemple, il protégera les nids du magnifique Grand Pic, une espèce forestière de première importance, dont les cavités qu’elle creuse fournissent des sites de nidification essentiels aux oiseaux résidents comme les chouettes et les hiboux, des oiseaux migrateurs en péril et des mammifères comme la Martre d’Amérique et les écureuils volants (polatouches). De plus, la nouvelle réglementation prendra en compte les droits constitutionnels des peuples autochtones au titre de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, ce qui constituera une étape importante vers la réconciliation.

Les nouvelles modifications – attendues depuis longtemps – qui seront apportées à l’échelle nationale aux moyens de protection des oiseaux migrateurs sont judicieuses et seront efficaces. Ces deux dernières années, la nature et le plein air nous ont donné un espoir rassurant et un répit bien nécessaire en ces temps difficiles. Les oiseaux, en particulier, nous ont enchantés et ont apporté un soulagement bienvenu au stress. En effet, ils ont contribué à nous sauver; nous leur devons de tout mettre en oeuvre pour assurer leur avenir.

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