Andrea Gress, coordonnatrice – Projets spéciaux, Oiseaux Canada
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Les marais accueillent une faune diversifiée qu’on ne trouve pas ailleurs dans la majorité des cas. Chacune des espèces de la liste suivante incarne parfaitement un mode de vie propre aux marais. Ces oiseaux sont souvent discrets et furtifs, mais ostentatoires sur le plan vocal. Cela nous les fait aimer!
Les marais comptent parmi les meilleurs endroits pour observer les oiseaux. Apportez votre insecticide et vos jumelles, et venez avec nous découvrir certains de nos oiseaux de marais préférés.
Butor d’Amérique

Le Butor d’Amérique est un héron de moyenne taille au plumage aux teintes de brun et de blanc fortement rayé. Photo : Brent Ferrie
Le Butor d’Amérique est un oiseau typique des marais. En fait, il est tellement adapté à cet environnement qu’il en fait pratiquement partie intégrante. Extrêmement discret et bien camouflé, il ne sera vraisemblablement jamais vu en dehors des zones humides.
Le Butor d’Amérique est un héron de moyenne taille au plumage aux teintes de brun et de blanc fortement rayé. Il présente sa posture typique lorsqu’il étire le cou vers le haut et pointe son bec pointu vers le ciel, se fondant presque parfaitement à la haute végétation dressée où il vit habituellement. Il ira même jusqu’à se balancer doucement au gré du vent pour mieux se camoufler lorsque les conditions s’y prêtent.
Mais ne vous laissez pas tromper par ce comportement tranquille! Le Butor d’Amérique est un chasseur féroce, capable de traquer sa proie (un poisson, un insecte ou une anoure) très subrepticement, avant de la frapper au moment où elle s’y attend le moins.
Comment en trouver un?
Pour de nombreux ornithologues amateurs, le simple fait d’entendre le Butor d’Amérique est déjà un exploit. Pour l’apercevoir, il faut de la patience, être au bon endroit au bon moment et avoir un peu de chance. Trouvez une partie d’un marais envahie par les roseaux où vous pouvez scruter lentement la ligne entre les roseaux et l’eau. Augmentez vos chances en prospectant à l’aube et au crépuscule. Au printemps, tendez l’oreille pour entendre une vocalisation comparable au mugissement d’un taureau (d’où son nom scientifique Botaurus lentiginosus): oong, kach, oonk.
On trouve le Butor d’Amérique dans toutes les provinces et en certains endroits dans les Territoires du Nord-Ouest. Selon L’état des populations d’oiseaux du Canada, les effectifs de l’espèce ont diminué de plus de moitié depuis 1970. Les efforts déployés pour protéger les habitats de milieux humides et en créer contribuent à préserver l’espèce.
Râle de Virginie

Attention! Comme ils ont le corps comprimé latéralement, les râles sont plus filiformes qu’ils ne le paraissent. Photo : Amanada Guercio
Les râles forment un groupe d’oiseaux de marais qui comprend la Marouette de Caroline, le Râle jaune et, bien sûr, le Râle de Virginie. Ici, oublions le vol: les râles sont la preuve que, dans les marais, tout est dans les pattes. En effet, chez les râles, le rapport entre les muscles servant à la marche et les muscles des ailes est supérieur à celui mesuré chez tous les autres groupes d’oiseaux. Avec ses pattes robustes et ses longs doigts agiles, le Râle de Virginie se déplace aisément dans les zones humides en marchant dans la boue et en se glissant facilement entre les herbes serrées.
En plus de ses pattes musclées, le Râle de Virginie possède un corps élancé et des vertèbres flexibles qui lui permettent de se faufiler dans les espaces étroits. Même les plumes de son front sont spécialement adaptées pour résister aux bords tranchants des herbes entre lesquelles il se déplace constamment.
Comment en trouver un?
Le Râle de Virginie est répandu dans tout le Canada sauf dans les régions nordiques. Visitez un marais d’eau douce à l’aube ou au crépuscule et observez les mouvements dans les eaux peu profondes ou les vasières, à proximité de la végétation haute (comme des roseaux ou des joncs). Ses déplacements sont moins discrets que ceux du Butor d’Amérique. Vous le verrez remuer la queue en marchant et peut-être plonger sous l’eau pour se déplacer dans les zones humides. Il vole rarement: pourquoi voler quand on a des pattes d’acier?
Côté voix, ce râle grogne comme un porc, oui! Il produit une panoplie de sons, mais celui qui ressort est son grognement.
Le nombre de Râles de Virginie varie d’une région à l’autre et selon le niveau de l’eau, mais à l’échelle nationale, sa population a doublé depuis 1970.
Bécassine de Wilson

Le long bec de cette bécassine est spécialement adapté pour capturer les invertébrés, comme des vers et des larves d’insectes, dans la boue. Photo : Aaron Everingham
Alors que le Râle de Virginie domine les marais grâce à ses pattes puissantes, la Bécassine de Wilson adopte une approche différente: elle met toute sa force dans son vol. Cet oiseau possède des muscles pectoraux extrêmement puissants qui représentent un quart de son poids, soit un ratio plus élevé que celui enregistré chez les autres oiseaux de rivage, et qui peuvent le propulser à une vitesse de près de 100 km/h!
Le long bec de cette bécassine est spécialement adapté pour capturer les invertébrés, comme des vers et des larves d’insectes, dans la boue. L’extrémité du bec peut détecter les proies et est flexible, ce qui permet à l’oiseau d’aspirer ses délicieux repas dans le substrat sans avoir besoin de refaire surface entre deux bouchées.
Comment en trouver une?
La Bécassine de Wilson se reproduit dans la majeure partie du Canada, de la pointe de Terre-Neuve jusqu’à l’extrémité du Yukon. On la trouve dans tous les types d’habitats humides et marécageux, et elle est plus active à l’aube et au crépuscule. Cherchez-la en train de fouiller dans la boue ou perchée sur un poteau de clôture ou une souche d’arbre. Si vous en effrayez une par inadvertance, elle s’envolera en zigzaguant, ce qui permet de la distinguer des espèces similaires.
L’aspect le plus distinctif de la voix de la Bécassine de Wilson est un son vibrant et plaintif (hou-hou-hou-hou-hou) qui rappelle parfois le hululement d’un hibou. Ce son n’est pas produit par le syrinx (organe vocal des oiseaux), mais par le frottement de l’air sur les plumes externes de la queue lors de la parade nuptiale en vol en piqué. La bécassine produit ce son très reconnaissable pour défendre son territoire et attirer des partenaires.
Environ 69% de la population nicheuse de la Bécassine de Wilson se trouve au Canada. Les effectifs de l’espèce ont fluctué au fil des ans, mais ils se situent actuellement dans la gamme souhaitée.
Bruant de Nelson

Malgré son apparence voyante, le Bruant de Nelson préfère rester caché, se camouflant bien dans la végétation marécageuse. Photo : Mark Peck
La plupart des oiseaux des marais sont spécialisés dans des types spécifiques de zones humides. Certains préfèrent l’eau salée, d’autres l’eau douce. Or le Bruant de Nelson est unique: il se reproduit dans les deux!
Le Bruant de Nelson niche dans les marais d’eau douce des prairies et de la forêt boréale, mais aussi dans les marais salés le long de la baie d’Hudson et de la côte atlantique. Le Canada accueille environ 86% de la population mondiale de l’espèce. C’est donc un excellent candidat à ajouter à votre liste lors de votre prochaine virée ornithologique.
Comment en trouver un?
Le Bruant de Nelson se démarque par sa beauté délicate. Ses joues grises sont entourées de jaune-orange qui couvre sa poitrine et ses flancs, contrastant avec des taches grises et brun clair et un ventre blanchâtre. Malgré son apparence voyante, il préfère rester caché, se camouflant bien dans la végétation marécageuse.
Pour repérer le Bruant de Nelson, il faut regarder vers le bas. Il niche dans les herbes, à quelques centimètres seulement du sol. Et il préfère sautiller, marcher ou effectuer de courts vols à basse altitude, alors qu’il se précipite à travers la végétation à la recherche d’insectes. Écoutez son chant, qui ressemble davantage à un chuintement qu’à une mélodie musicale.
La population du Bruant de Nelson demeure stable dans l’ensemble du pays, mais elle a fluctué d’une région à l’autre: on a enregistré des déclins dans les forêts boréales et les provinces maritimes, mais des hausses dans les Prairies.
Grèbe à bec bigarré

Le Grèbe à bec bigarré vit dans les habitats de marais classiques, mais aussi sur les lacs et les rivières au courant lent. Photo : Darshan Talawadekar
Le Grèbe à bec bigarré est un petit oiseau aquatique au corps compact dont l’adulte nuptial a le bec cerclé de noir. Son plumage est en grande partie brun. Sa queue est courte, mais ses grosses pattes aux doigts lobés en font un nageur hors pair. Ce n’est peut-être pas le grèbe le plus spectaculaire, mais ses talents de plongeur lui valent une place dans la présente liste!
Le Grèbe à bec bigarré emmagasine de l’air dans ses plumes et en libère à sa guise pour contrôler sa flottabilité. Cela lui permet de s’enfoncer lentement (ou rapidement) dans l’eau, comme un sous-marin. Il peut même garder les yeux hors de l’eau, comme un crocodile ou un hippopotame. Tous les grèbes possèdent cette capacité, mais c’est chez le Grèbe à bec bigarré qu’elle est la plus prononcée.
En cas de danger imminent, ce grèbe met de côté sa délicate technique de plongée sous-marine et se jette à l’eau en utilisant ses ailes pour pousser son corps vers le fond. Il remporte la palme pour les plus impressionnantes éclaboussures!
Comment en trouver un?
Le Grèbe à bec bigarré vit dans les habitats de marais classiques, mais aussi sur les lacs et les rivières au courant lent. Il se nourrit souvent en eau libre, puis se faufile dans les zones végétalisées (parmi les roseaux et les joncs) où il construit son nid flottant.
En ce qui touche la voix, ce petit oiseau ne donne pas sa place. Comme nombre d’espèces des marais, il produit un cri caractéristique. Le mâle émet une suite de roucoulements haletants et aussi un jacassement nasillard prolongé.
Le Canada accueille seulement 13% de la population du Grèbe à bec bigarré. Les effectifs ont augmenté lentement au-dessus des niveaux enregistrés en 1970, mais ils varient en fonction du niveau de l’eau sur les lieux de nidification.