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Par Andrew Huang, Kiirsti Owen et Devin R. de Zwaan, Ph. D.

Note : Les liens indiqués dans le texte, sauf ceux du premier paragraphe, mènent à des pages Web en anglais.

Chaque année au printemps et en automne, le ciel regorge de milliards d’oiseaux migrateurs. Au cours de leur éprouvant voyage, ceux-ci doivent s’arrêter pour faire le plein d’énergie en prenant du poids. En se gavant d’insectes, de graines et de petits fruits, ils accumulent des quantités massives de graisse – atteignant jusqu’à 50 % de leur masse corporelle – car la graisse est la principale source d’énergie qui alimente leurs périples de haute endurance. Il n’est donc pas surprenant que les haltes soient une composante essentielle d’une migration réussie; elles devraient donc faire l’objet d’une plus grande attention qu’actuellement en matière de conservation. Cependant, à quoi ressemblent les haltes migratoires de «grande qualité», et comment évaluer cette qualité?

On voit des bénévoles à l’extérieur du poste de baguage de l’Observatoire d’oiseaux de l’île Iona. Le boisé est une parcelle de forêt de feuillus en phase de succession qui accueille une abondance d’oiseaux insectivores pendant leurs migrations. Photo: Kiirsti Owen.

En nous basant sur des données recueillies pendant 10 ans à l’Observatoire d’oiseaux de l’île Iona (OOII) – une station de baguage d’oiseaux exploitée par WildResearch dans le coin sud-ouest de la Colombie-Britannique – nous avons étudié les processus écologiques qui façonnent la dynamique des haltes migratoires de cinq espèces de parulines et de cinq espèces de bruants. Plus précisément, nous voulions déterminer comment la saison, la guilde alimentaire et la stratégie de migration influençaient le gain de masse et comment, à leur tour, ces facteurs influaient sur la durée des escales. Nous avons constaté qu’en général, les oiseaux séjournant à l’île Iona gagnaient de la masse en constituant des réserves de graisse à un rythme quotidien élevé, mais que ce rythme variait selon les espèces et les saisons. Le gain de masse était particulièrement prononcé au printemps, pour les oiseaux insectivores (parulines) et, surtout, pour les migrateurs au long cours (Parulines verdâtre, jaune et à calotte noire, Bruants de Lincoln et à couronne blanche). Nos résultats ont également montré que les oiseaux qui étaient plus gras à l’arrivée partaient plus tôt, tandis que les individus plus légers restaient plus longtemps, vraisemblablement pour reconstituer leurs réserves de graisse épuisées. Il se pourrait donc que les parulines et les bruants de notre étude doivent atteindre un certain seuil de masse avant de poursuivre leurs migrations. En fait, la masse était un prédicteur plus fort de la probabilité de départ que les conditions météorologiques pendant la migration de printemps, lorsque les oiseaux sont particulièrement pressés de rejoindre leurs lieux de reproduction.

Deux des espèces le plus couramment capturées à la station de baguage: à gauche une Paruline à croupion jaune, un migrateur à courte distance, et à droite, une Paruline jaune, un migrateur au long cours. Photo: Andrew Huang.

Notre étude fournit des preuves solides du rôle de l’île Iona en tant qu’escale de grande qualité pour les oiseaux qui empruntent la voie migratoire du Pacifique. Nous constatons qu’à l’île Iona: 1) les migrateurs qui restent plus longtemps prennent plus de poids en raison du gain de masse adipeuse, 2) les migrateurs au long cours peuvent se ravitailler à un rythme élevé et 3) les migrateurs en détresse énergétique peuvent combler rapidement les déficits en carburant. Bien qu’elle soit entourée de centres métropolitains et de zones où l’on pratique une agriculture intensive, l’île Iona constitue une mosaïque de milieux humides saumâtres, de roselières et de parcelles de forêts de feuillus, soit l’habitat idéal des oiseaux migrateurs, en particulier les espèces insectivores. Elle peut représenter une «île écologique» où faire escale dans une matrice régionale d’habitats sous-optimaux. La protection des haltes migratoires essentielles comme celle-ci est un élément clé de toute stratégie de conservation des oiseaux.

En conclusion, nous adressons un énorme MERCI à tous les bénévoles et sympathisants de WildResearch! Sans leur précieux temps et leur soutien financier, le programme de l’OOII n’existerait pas et notre étude n’aurait pas eu lieu. Les programmes scientifiques communautaires tels que les stations de baguage sont impératifs pour le suivi à long terme des oiseaux chanteurs. Les gestionnaires des terres devraient s’associer à ces programmes dirigés par des bénévoles et les soutenir afin d’évaluer comment les taux de ravitaillement des oiseaux chanteurs et leur comportement en migration pourraient évoluer dans le temps en réaction aux changements climatiques, à l’évolution des priorités concernant l’utilisation du territoire et aux efforts de restauration des habitats.

L’étude faisant l’objet du présent article: Mass gain and stopover dynamics among migrating songbirds are linked to seasonal, environmental, and life-history effects, par D.R. de Zwaan, A. Huang, Q. McCallum, K. Owen, M. Lamont et W. Easton.

Note de la rédaction – Oiseaux Canada remercie les auteurs d’avoir soumis ce billet de blogue qui souligne l’importance de l’île Iona pour les oiseaux migrateurs. Cette île se trouve dans l’estuaire du fleuve Fraser, qui sera vraisemblablement désigné zone clé pour la biodiversité (ZCB). Avec nos partenaires, nous militons pour la protection de cette zone importante et menacée de la voie migratoire du Pacifique. 

Les données utilisées dans cette recherche ont été recueillies auprès de l’Observatoire d’oiseaux de l’île d’Iona, membre du Réseau canadien de surveillance des migrations administré par Oiseaux Canada.

L’étude a été financée en partie par le Fonds commémoratif James L. Baillie, qui est géré par Oiseaux Canada et financé par le Grand Birdathon pancanadien annuel et des dons privés.

Des bénévoles de l’OOII apprennent comment manipuler et baguer correctement une Paruline masquée. Il faut détenir les permis appropriés et être supervisé par des bagueurs qualifiés pour capturer et manipuler les oiseaux. Les bénévoles sont au coeur des activités de suivi des migration de WildResearch. Photo: Andrew Huang.

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