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Par Pete Davidson, conseiller principal en conservation, Oiseaux Canada, et membre du Sous-comité de spécialistes des oiseaux du COSEPAC, ainsi que Richard D. Elliot, Ph. D., et Marcel H. Gahbauer, Ph. D., coprésidents du Sous-comité

 

Deux fois l’an, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), une entité indépendante, formule des recommandations sur lesquelles se fonde le gouvernement fédéral pour envisager de prendre des mesures de protection légale des espèces visées en vertu de la Loi sur les espèces en péril. Les bénévoles d’Oiseaux Canada sont à la base de ce processus.

«Les citoyens scientifiques de tout le continent apportent une contribution fondamentale à l’établissement des tendances populationnelles de nombreuses espèces, précise Richard Elliot. Sans ces personnes, cela ne serait pas possible.»

Le COSEPAC a établi sept catégories de statut des espèces: Disparue, Disparue du pays (mais qu’on trouve ailleurs), En voie de disparition, Menacée, Préoccupante, Données insuffisantes (l’information disponible est insuffisante pour déterminer l’admissibilité de l’espèce à l’évaluation) et Non en péril. En mai 2021, le COSEPAC a évalué la situation de 26 espèces ou populations discrètes d’espèces sauvages, dont cinq oiseaux. L’évaluation comprend les indications habituelles de grave préoccupation, mais laisse également place à un peu d’optimisme prudent.

Ross’s Gull Photo: Lev Frid

La petite et délicate Mouette rosée, avec son plumage adulte rose tendre, gris et blanc poudre, est l’un des plus beaux oiseaux de mer. C’est un plaisir rare d’en voir une et, malheureusement, la probabilité que cela se produise au Canada diminue. Le COSEPAC a classé l’espèce dans la catégorie En voie de disparition, soit deux catégories plus proches de la disparition qu’il y a 25 ans. On sait maintenant que moins de 20 individus se reproduisent au Canada et, en 14 ans, aucun jeune n’a pris son envol de la seule colonie connue du Canada, dans le Haut-Arctique. Les sites de nidification du Bas-Arctique canadien ont été abandonnés depuis la dernière évaluation de la situation de l’espèce (dans la catégorie Menacée), en 2007. Les principales menaces qui pèsent sur cette mouette sont la prédation des poussins exercée par les Sternes arctiques et la contamination par des substances chimiques toxiques en suspension dans l’air. Les effets des changements climatiques sont en grande partie inconnus. Presque toute la population mondiale de la Mouette rosée niche dans le nord-est de la Sibérie et, à l’échelle du globe, l’espèce est classée dans la catégorie Préoccupation mineure par BirdLife International (page en anglais), ce qui est positif; de petits nombres pourraient peut-être passer inaperçus dans le Haut-Arctique canadien.

 

Short-eared Owl in head onflight
Short-eared Owl Photo: Brendan Kelly

Le Hibou des marais est un des membres de la famille des Strigidés les plus répandus dans le monde. Actif le jour comme la nuit, cet oiseau nomade qui niche au sol se reproduit dans des habitats ouverts partout au pays. L’évaluation de sa situation repose sur les données recueillies par des citoyens scientifiques. Les nouvelles estimations de population dérivées des données d’atlas des oiseaux nicheurs portent à croire que la population canadienne compte environ 31 000 adultes, ce qui ne représente qu’environ 10% des estimations précédentes. Et les données du Relevé des oiseaux nicheurs (BBS) et du Recensement des oiseaux de Noël indiquent un déclin de plus de 30% des effectifs au cours des trois dernières générations. Par conséquent, l’espèce est désormais désignée menacée, alors que les auteurs des évaluations antérieures effectuées en 1994 et 2008 l’avaient classée préoccupante. Et la poursuite des déclins est à prévoir à cause de la perte continue d’habitats de nidification et d’hivernage due à la conversion des cultures, à l’intensification de l’agriculture, à l’urbanisation et à la propagation de plantes envahissantes. Qui plus est, dans les habitats du Bas-Arctique, l’augmentation de la croissance des arbustes due au climat réduira encore la disponibilité des proies et augmentera le risque de prédation.

Band-tailed Pigeon Photo: Ayman Rizk

Le Pigeon à queue barrée, cette espèce forestière frugivore qui fréquente le sud-ouest de la Colombie-Britannique, continue de figurer dans la catégorie Préoccupante, comme c’était le cas à sa dernière évaluation en 2008. Toutefois, les individus présents au Canada voient leur habitat de nidification se réduire sous l’effet de la coupe de bois et de l’urbanisation: le BBS révèle un déclin continu à long terme de 11% sur trois générations. Et des relevés réalisés là où les pigeons s’assemblent pour consommer de l’eau ou du sol riche en minéraux semblent indiquer des baisses d’effectifs d’environ 40% sur trois générations par endroits. La plupart des individus qui nichent au Canada hivernent dans l’ouest des États-Unis, où ils sont exposés à la perte d’habitat, à la chasse et à une maladie prévalente causée par des parasites. Le Pigeon à queue barrée pourrait donc bientôt être considéré comme une espèce menacée, à moins que ces dangers ne puissent être atténués.

Barn Swallow Photo: Graham Sorenson

Une nouvelle encourageante concerne une favorite du public, et l’un des oiseaux les plus répandus au monde, l’Hirondelle rustique. Les lecteurs seront heureux d’apprendre que l’important déclin survenu en deux décennies (à partir de la fin des années 1980) qui a motivé la désignation de l’espèce comme menacée en 2008 s’est stabilisé ces dix dernières années. Les baisses d’effectifs encore enregistrées dans certaines provinces sont contrebalancées par une importante augmentation en Saskatchewan, laquelle a justifié le classement de l’espèce comme préoccupante au lieu de menacée. Bien que la population canadienne demeure importante, soit d’environ 6,4 millions d’adultes, elle pourrait redevenir menacée si les dangers persistent ou s’aggravent.

 

Ferruginous Hawk Photo: Yousif Attia

L’impressionnante Buse rouilleuse est le seul oiseau de proie confiné aux prairies des Grandes Plaines de l’Amérique du Nord. Les effectifs dans l’aire de répartition canadienne du sud de l’Alberta et de la Saskatchewan et de l’extrême sud-ouest du Manitoba ont été stables ou même en légère augmentation au cours des trois dernières générations, ce qui a entraîné le reclassement de l’espèce de menacée à préoccupante. La classification de cette espèce a oscillé entre ces deux catégories depuis sa désignation initiale comme menacée en 1980. Cette dernière désignation reconnaît que la Buse rouilleuse peut réintégrer cette catégorie de nouveau si l’on n’assure pas une gestion efficace de la perte continue d’habitats d’alimentation et de nidification due à des menaces telles que les déplacements causés par la production d’énergie, l’augmentation de la concurrence, les dérangements aux sites de nidification et la persécution des proies.

Pour en savoir davantage sur le processus d’évaluation du COSEPAC, vous pouvez prendre connaissance de ce billet de Jon McCracken, ex-directeur à la retraite des Programmes nationaux d’Oiseaux Canada et ancien coprésident du Sous-comité de spécialistes des oiseaux du COSEPAC.

 

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