Par James Casey, spécialiste de l’estuaire du Fraser, Oiseaux Canada
Quiconque circule à vélo sur les chemins de campagne du delta du Fraser à l’automne a toutes les chances de tomber sur de grandes bandes d’Oies des neiges. À l’époque où je faisais mes premières armes comme observateur d’oiseaux, celles-ci m’ont donné un premier aperçu de la remarquable abondance des populations d’oiseaux dans la région. Je me suis mis à la recherche de plus d’information et j’ai trouvé l’un des premiers documents sur le sujet, et un de ceux qui sont le plus souvent cités en référence, soit l’article de Robert Butler, Ph. D., et de Wayne Campbell intitulé «The birds of the Fraser River delta: populations, ecology and international significance», paru en 1987. On peut dire qu’il s’agit d’un document fondateur dans la prise de conscience de l’importance du delta du Fraser pour les oiseaux migrateurs. Pourtant, selon les auteurs, la population d’Oies des neiges à l’époque atteignait un maximum de 40 000 individus. Bien sûr, c’est beaucoup, mais cela fait pâle figure en comparaison des quelque 118 000 oiseaux qui ont hiverné dans le delta du fleuve Fraser en 2018-2019. Aussi important que soit l’article de 1987, les populations d’oiseaux ont changé au cours des 30 années qui ont suivi sa publication.
Depuis, j’ai eu le privilège de me joindre à Robert Butler, l’un des deux auteurs de l’article original, et à David Bradley, Ph. D., d’Oiseaux Canada, pour le mettre à jour. Le nouvel article a récemment été publié dans un numéro spécial de British Columbia Birds, la revue scientifique des British Columbia Field Ornithologists; il jette un regard nouveau sur l’importance du delta du Fraser pour les oiseaux migrateurs. Des recherches ont démontré que les oiseaux sont remarquablement abondants dans la région; on y dénombre plus de 1,7 million d’individus de 262 espèces. De celles-ci, 69 sont considérées comme en péril et ont la priorité quant aux mesures de conservation. L’observation des Oiseaux et le secteur du tourisme génèrent 11 millions de dollars de revenus par année et, de ce fait, contribuent directement à l’économie de la région.
Pygargue à tête blanche Photo : Tom Middleton
Grèbe élégant Photo : Tom Middleton
Ce sont des statistiques convaincantes pour les résidents de la région comme nous, mais la véritable valeur du delta du Fraser réside dans le rôle qu’il joue pour les oiseaux migrateurs. Des 262 espèces d’oiseaux recensées dans le delta, seulement 35% y résident toute l’année. Les 65% restants sont des espèces migratrices qui se reproduisent ici l’été, qui restent ici quand les hivers sont doux ou qui y font halte dans leur migration vers le nord. Le delta du fleuve Fraser est vraiment unique en ce qu’il soutient des millions d’oiseaux dans leur incroyable voyage à travers la vie. Cela explique pourquoi beaucoup d’observateurs du Canada et de l’étranger s’y rendent pour pouvoir admirer et apprécier les espèces extraordinaires qui se déplacent le long de notre côte. Ce lieu rassemble non seulement des oiseaux, mais aussi des gens du monde entier.
Heureusement, la quantité d’oiseaux dans le delta du Fraser est restée assez stable au cours des 30 dernières années, avec quelques espèces dont le nombre fluctue. Les effectifs de l’Oie des neiges, du Canard branchu, du Pygargue à tête blanche et du Faucon pèlerin ont augmenté, tandis que ceux du Grèbe élégant, de l’Engoulevent d’Amérique et de l’Hirondelle rustique ont diminué. Dans l’ensemble, nos populations locales se maintiennent, même si l’on déplore la perte de milliards d’oiseaux à l’échelle de l’Amérique du Nord.
La situation enviable du delta du Fraser n’est pas un mystère. Des mesures de conservation proactives comme la création d’aires de gestion de la faune provinciales le long de zones intertidales ainsi que les avantages que les terres agricoles procurent tant aux humains qu’aux oiseaux permettent de tenir l’industrialisation en échec. En outre, les interventions de la communauté des naturalistes et l’élaboration de programmes d’intendance tels que le Delta Farmland and Wildlife Trust ont joué un rôle essentiel dans l’atteinte des objectifs de conservation.
Malheureusement, les moyens employés dans le passé ne suffisent pas à assurer un avenir viable au delta du Fraser. L’évolution actuelle des infrastructures de transport maritime et les conséquences de l’élévation du niveau de la mer mettent à mal nos succès antérieurs en matière de conservation. L’incroyable habitat que constitue le delta et la biodiversité qui le caractérise sont aujourd’hui menacés par le développement rapide et les changements climatiques.
Si nous voulons continuer à profiter de l’abondance d’oiseaux que l’on trouve sur notre côte et au-delà, nous devons soutenir l’établissement d’un nouveau plan de gestion de l’estuaire du Fraser. Ce plan mobiliserait les principaux intervenants et permettrait de relever les défis auxquels l’estuaire est confronté aujourd’hui et dans l’avenir. Joignez-vous à nous pour célébrer et préserver cet habitat unique. Suivez la ZICO du delta du Fraser sur Facebook et Instagram pour rester au courant des derniers développements et savoir comment vous pouvez vous impliquer.