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Par Ian Cook, gestionnaire – Conservation des prairies, Oiseaux Canada

Les milieux naturels caractéristiques des Prairies canadiennes accueillent des oiseaux étranges et merveilleux. En ces lieux uniques, on observe des créatures telles que la grégaire et bavarde Maubèche des champs, le Tétras à queue fine, un fervent de parades nuptiales, et la Pie-grièche migratrice, ce passereau qui a l’habitude macabre d’embrocher ses proies sur des barbelés. Or, même dans cet ensemble de personnages délicieusement étranges, la Chevêche des terriers réussit à se démarquer.

C’est une petite chouette qui nidifie sous terre dans des terriers qu’elle ne peut pas creuser elle-même. Pour cela, elle compte sur le blaireau, qui est toutefois aussi l’un de ses principaux prédateurs. Ce petit oiseau tapisse son terrier d’excréments, le décore d’os et émet des sons de serpent à sonnettes. La Chevêche des terriers est charismatique au point d’être parfois carrément comique, mais elle est aussi une merveille de l’évolution et un microcosme des outils évolutionnistes dont un oiseau a besoin pour survivre dans un environnement largement dépourvu d’arbres, qui subit des extrêmes et est façonné par le pâturage et des incendies fréquents.

Bien que la Chevêche des terriers soit si unique, son histoire récente est malheureusement partagée avec le reste des oiseaux des prairies au Canada. Les effectifs des oiseaux des prairies diminuent plus rapidement que ceux de tout autre groupe d’oiseaux au Canada, soit dans une proportion de près de 60% au cours des 50 dernières années. Les populations de Chevêches des terriers au Canada se sont effondrées d’environ 90% dans les années 1990 et continuent de diminuer depuis.

 

Dans le tout dernier épisode de notre balado The Warblers (en anglais), Andrea Gress explore avec Graham Dixon-MacCallum, de l’Institut Wilder, certaines des causes de la raréfaction de la Chevêche des terriers dans le cadre de notre série «The Wake-up Call». Nombre de ces causes, dont la perte d’animaux fouisseurs qui creusent les gîtes dont les chevêches ont besoin, les pesticides qui réduisent l’abondance des proies et la perte de zones de nidification adéquates, sont liées à la perte d’habitats de prairies. La plupart des pertes de prairies dans l’aire de répartition de l’espèce au Canada sont dues à la conversion à l’agriculture de ces milieux autrefois utilisés pour le pâturage du bétail. La Chevêche des terriers peut s’établir dans un pâturage, mais pas dans un champ de blé, de canola ou de lentilles. Pour les éleveurs, il est souvent peu ou non rentable de conserver les prairies intactes et de continuer d’élever du bétail s’ils peuvent cultiver des céréales à la place. Cela ne veut pas dire que l’agriculture céréalière est mauvaise (ou facile) – il est évident que nous avons besoin de céréales – mais les aspects économiques font qu’il est très difficile pour les producteurs de choisir de conserver les prairies intactes. En raison de ces facteurs économiques, les prairies tempérées des Prairies canadiennes ont subi de profonds changements. Elles constituent aujourd’hui le biome le plus sous-protégé et le plus menacé de la planète. Chaque année, 185 000 hectares de prairies continuent de disparaître dans les Prairies canadiennes!

 

Oiseaux Canada travaille fort dans cette région du pays pour aider les oiseaux des prairies. Notre travail ici est ancré dans notre mission, à savoir améliorer – à partir d’une approche scientifique – la connaissance, l’appréciation et la conservation des oiseaux. En étroite collaboration avec la Fédération canadienne de la faune et le South of the Divide Conservation Action Program Inc., nous prélevons des échantillons d’oiseaux, de plantes et d’insectes dans les ranchs de la Saskatchewan afin de mieux comprendre les relations entre tous ces éléments et le pâturage du bétail. Nous effectuons des relevés d’oiseaux dans des fermes, des ranchs et des terres autochtones dont les propriétaires participent à des programmes de conservation et d’intendance au Manitoba et en Saskatchewan. Ce travail est soutenu par divers partenaires, dont ALUS Canada, Manitoba Habitat Conservancy, Conservation de la nature Canada et la Saskatchewan Stock Growers Foundation. Nous présentons ensuite les résultats de nos relevés d’oiseaux aux producteurs et aux gestionnaires de terres pour les aider à mieux connaître la communauté aviaire qui habite leurs propriétés. Ce printemps, nous avons trouvé une Chevêche des terriers dans un ranch de la Saskatchewan, et l’éleveur était absolument ravi que cette espèce ait élu domicile dans ses prairies! Ces rencontres avec les producteurs sont un excellent moyen d’apprendre les uns des autres.

De plus, nous travaillons d’arrache-pied pour nous attaquer plus directement à la cause première du déclin des effectifs des oiseaux des prairies au Canada, à savoir la conversion des prairies, en élaborant des approches novatrices pour la conservation de ce groupe d’oiseaux. En plus de travailler à l’élaboration d’une nouvelle politique, nous développons un indicateur de biodiversité appelé Indice de préservation de l’avifaune. En mesurant les effets de la conservation et de la gestion sur l’ensemble de la communauté des oiseaux des prairies d’une ferme, d’un ranch ou d’une zone protégée, cet indice montre les avantages que procure une ferme ou un ranch aux oiseaux et à la biodiversité. Cela permet de mettre en place des instruments de marché et stratégiques qui récompensent les résultats positifs pour les oiseaux.

Grâce au soutien que vous apportez à notre travail dans les Prairies canadiennes, nous contribuons à faire en sorte que les oiseaux de ces milieux, dont l’originale et merveilleuse Chevêche des terriers, continuent d’y vivre pendant de nombreuses années encore.

 

 

Chevêche des terriers. Photo: Evan Larson.jpg

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